Mon beau sapin

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Quand j’étais petite, avec mon père, on traversait la rue, puis on allait marcher dans le bois, afin de trouver le bon.

Je me promenais les yeux en l’air, à la recherche celui qui illuminerait notre temps des Fêtes.

Je les examinais tous, je trouvais l’exercice plutôt difficile car je ne voulais faire de peine à personne…mais il fallait bien en choisir un. Je flattais leurs branches, sentais l’odeur des épines à la recherche du parfum le plus réconfortant.

Lorsqu’enfin, après plusieurs minutes d’observation silencieuse, je sentais une connexion un peu plus forte avec celui qui allait être le bon, mon père s’éloignait et me laissait respectueusement pratiquer mon rituel : m’approcher doucement de l’arbre, poser une main sur son tronc, lui expliquer ce qui allait se passer, lui demander la permission de l’emmener avec nous. Lorsqu’il avait accepté, je faisais signe à mon père qui venait donner quelques coups de hache. On le déposait ensuite dans le traîneau, puis on rentrait à la maison, le décorer. Je lui donnais à boire, le remerciant d’avoir accepté ma proposition. C’était mon nouvel ami et sa présence me rendait infiniment heureuse.

Cette année, lorsque je suis partie à la recherche de ce qui allait être notre sapin de filles au début du mois, j’ai fait le tour de quelques kiosques dans la ville, peut-être un vieux réflexe, un besoin de sentir que je prenais le temps de chercher le bon. Je me suis d’abord arrêtée à un endroit qui avait des airs de cimetière de sapins. J’exagère je sais – j’en ai même fait un métier – mais la vue de ces arbres ligotés avait quelque chose  de très triste qui me paraissait bien loin de mes souvenirs de petite fille. Et lorsque le vendeur m’a gueulé le prix exagérément élevé de ces arbres qui n’appartiennent pourtant à personne, je me suis dit que tout ça manquait grandement de romantisme.